Le code de l’Indigénat cantonnait les kanak dans des réserves et les excluait de la ville jusqu’à sa suppression en 1946. Un gros besoin de main d’œuvre peu qualifiée pour le bâtiment et la transformation du nickel a attiré une population calédonienne et océanienne (notamment Wallis et Futuna) logée au début dans de grands ensembles de périphérie. Depuis une vingtaine d’années, un habitat spontané a pris possession de terrains en friche servant souvent au départ de jardin de cultures vivrières. La saturation et l’absence de logements sociaux a souvent poussé le cultivateur à s’installer définitivement et à améliorer sa « cabane ». Les terrains appartiennent presque toujours à l’Etat à des endroits souvent peu visibles (mangrove, bord de mer,creux de vallée..). Quelques pistes permettent l’accès aux voitures vers ces « squats » bien organisés avec ses lieux de prière, ses terrains de sport ou ses nakamals où on consomme le kava. On y retrouve le mode de vie océanien transposé au milieu urbain avec un chef et une attribution traditionnelle des terres.
Le recensement de 2008 fait état de 8148 personnes qui viennent chercher du travail ou des études pour leurs enfants ou sont de passage. Il n’y a souvent qu’un seul revenu par foyer et souvent précaire (manœuvre, femme de ménage) , et cette recherche de ressources financières laisse peu de temps à l’éducation des enfants souvent livrés à eux-mêmes d’où la déscolarisation, la perte d’autorité des familles et la délinquance. Les jeunes sans qualification cachent leur appartenance au squat de peur de ne pas être embauchés.
La gestion des déchets est anarchique ,l’absence de fosses septiques et de stations d’épuration ainsi que le climat accélèrent la prolifération microbienne. Ceux qui n’ont pas de raccordement électrique sont conduits à l’achat de groupes électrogènes et à une forte consommation d’essence. Les transports en commun, les écoles, l’accès aux soins, les institutions en général sont souvent très éloignés ce qui crée un sentiment d’isolement et d’abandon.
« La population de la ville formelle rejette assez unanimement le principe même du squat. Il ne s'agit pas là simplement d'un rejet social ou ethnique, mais d'une conception différente du partage et de l'acquisition du territoire. L'accès, par des populations socialement défavorisées, à un logement individuel doté d'un jardin, situé en bord de mer et près du centre de la ville, choque pour le moins le sens des valeurs de cette population. Qui plus est, le squat est perçu, toujours, comme une menace pesant sur le principe même de la propriété privée, et parfois, aussi, comme une mainmise inopportune des populations océaniennes sur la ville, restée volontairement "blanche" pendant près d'un siècle. » extrait de "Le territoire, lien ou frontière" de Dorothée Dussy, ORSTOM/MESR, 1995
Pour les Européens et selon leur conception de l'utilisation de l'espace, la terre de Nouméa était inhabitée, c'est-à-dire dépourvue de village permanent. Pour les Mélanésiens en revanche, le site était approprié et utilisé; soit il relevait des dix tribus mentionnées plus haut, installées en permanence, soit il était simplement utilisé comme lieu de passage ou de résidence temporaire.
On peut également s'interroger sur l'avenir de ces enclaves urbaines d'habitat spontané. Bien que le discours officiel annonce régulièrement la suppression des squats, la pratique tend, comme on l'a vu, à pérenniser leur présence. Les institutions concluent des accords avec les squatters qui s'engagent à limiter le développement des quartiers spontanés en l'échange d'une
amélioration de leurs conditions de vie. Le développement du logement social est certainement une des clefs du problème.
lundi 2 mars 2009
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